On parle régulièrement des tests effectués sur les animaux dans les cosmétiques. En revanche, on souligne beaucoup moins la présence d’ingrédients d’origine animale, extraits d’animaux (vivants ou morts) ou issus de la production cosmétique. Pourtant, ils sont fréquents dans nos produits quotidiens. C’est le cas du requin, qui subit des attaques perpétuelles pour finir dans nos crèmes et autres produits de beauté. Une horreur écologique au service d’une industrie de toute beauté.
Des cosmétiques qui utilisent les animaux
Avant toute chose, il faut faire la distinction entre les productions que l’on prélève sans porter atteinte à l’animal lui-même et les matières premières extraites d’animaux vivants ou morts.
Les productions animales
Ce sont des produits ou des substances que l’animal produit naturellement. Elles se divisent en 2 familles :
Les productions de type physiologique : elles s’inscrivent parfois dans un but d’autoprotection de l’animal.
C’est le cas de la lanoline qu’on récupère de la laine du mouton ou de la soie de la chenille du ver Bombyx. Elles peuvent aussi être destinées à assurer la survie de l’espèce sous forme d’oeuf ou de lait.
Les productions résultant du travail des animaux : elles sont fabriquées par différentes espèces pour satisfaire leurs propres besoins.
La ruche fournit ainsi son miel, sa cire d’abeille, sa propolis ou sa gelée royale. Dans les cosmétiques, ces matières premières sont utilisées à l’état brut ou sous forme d’extrait. Elles peuvent également être transformées pour générer d’autres ingrédients.
Les extraits d’animaux
Ils sont constitutifs de l’organisme animal et doivent être prélevés directement sur lui.
Pour la grande majorité, cela signifie la mort de l’animal. C’est le cas notamment pour les corps gras, largement utilisés en cosmétique et qui peuvent provenir des graisses animales.
Le glycérol (ou glycérine), connu pour ses vertus hydratantes, peut ainsi provenir de l’hydrolyse de la graisse récupérée sur les carcasses des animaux d’abattoir. Et le squalane, autre produit hydratant, de l’hydrogénation du squalène, un composé lipidique présent en grande quantité dans l’huile de foie de requin.
Selon une étude effectuée en 2012 par ETC Group, la demande annuelle de squalène oscille entre 1000 et 2000 tonnes.Or, il faut les foies d’environ 3000 requins pour en produire 1 seule tonne .
C’est ainsi que le requin se trouve aujourd’hui menacé. Pratiques de pêche illégales, absence de statistiques, rejet dans la mer de mer de requins mutilés.
A quelles fins ? Satisfaire aux exigences de la création cosmétique, qui utilise des extraits d’animaux.
L’association Shark Citizen montre les dents pour protéger le requin
En 2013, Shark Citizen a mené une enquête sur plusieurs mois concernant les marques qui utilisent des produits à base de requin.
Résultats : on trouve du requin (cartilage ou huile de foie le plus souvent) dans de nombreux produits disponibles sur le marché européen, et notamment français. Toutefois, le mot « requin » n’est ni mentionné sur l’emballage ni sur la notice. Aucune information sur la nature ou l’origine des produits utilisés dans la composition : alkylglycérol, glucosamine, chondroïtine ou squalène.
Huile de foie de requin, un réseau d’approvisionnement opaque
Le système international d’approvisionnement en requin est complexe et mouvant. Il est constitué d’un nombre important d’intermédiaires et d’une grande quantité de produits.
La plupart des marques refusent de communiquer sur la provenance des matières premières et sur méthodes utilisées, les fournisseurs ou encore les laboratoires.
Tandis que l’UICN (Union Internationale pour la Conservation de la Nature) indique que 25% des espèces de requins, raies et chimères sont menacées dans le monde, les produits à base de requin comptent parmi les meilleures ventes des marques.
On en trouve jusque dans la nutrition sportive et dans la filière vétérinaire pour soigner l’arthrose des animaux.
Des marques qui tentent de se dédouaner
La plupart des marques se réfugient derrière des explications « toutes faites » :
- Les effets des produits sont présentés comme « prouvés », notamment leur caractère anticancéreux.
- L’écosystème marin est protégé, puisqu’elles utilisent des requins d’élevage.
- La nature est préservée : les requins concernés seraient des sous-produits d’animaux pêchés et vendus pour leur viande. Exit donc, le gaspillage !
Mais des études infirment les fondements scientifiques selon lesquels utiliser des produits à base de requin aurait un effet positif sur la santé.
Les « tests » mis en avant par l’industrie sont remplis de lacunes : protocoles inadaptés, pas d’amélioration significative de la qualité de vie lorsque les essais sont correctement conçus,pas de connaissances précises sur le support de l’activité biologique des substances testées etc.
Quant à l’argument des « requins d’élevage », il ne tient pas la route car les élevages de requins n’existent pas.
Alors combien de requins sacrifiés pour une telle entreprise ? Impossible d’avoir un chiffre précis mais toutes les estimations font peur.
En 2013, plus de 200 marques utilisent ouvertement des produits à base de requin
En 2013, sur le marché français, plus de 200 marques utilisent ouvertement des produits à base de requin (cartilage de requin, huile de foie de requin et huile de foie de chimère, chondroïtine extraite de cartilage de requin).
Des arguments cosmétiques bien rodés pour vendre
Les marques qui utilisent du requin dans la composition de leurs produits n’hésitent pas à en vanter les qualités.
Parmi les bienfaits soi-disant « constatés » ou « démontrés » : amélioration des performances sexuelles, réduction des problèmes articulaires et solution miraculeuse dans la guérison de maladies comme le cancer ou l’Alzheimer.
Brandir ces arguments « santé » ou « naturels » permet de sécuriser le consommateur et de le conforter dans son achat.
La consommation de produits à base de requin sans danger pour le consommateur ?
Ce qu’on ne dit cependant pas, c’est que les produits à base de requin présentent un risque sanitaire.
En effet, ces prédateurs océaniques accumulent une grande quantitéd’hydrocarbures, pesticides, métaux lourds et autres polluants chimiques dans leur organisme.
Les taux de méthylmercure (le plus dangereux des dérivés du mercure, qui s’attaque au système nerveux et aux reins) contenus dans les tissus des requins peuvent être très élevés.
C’est le cas aussi des concentrations de neurotoxines augmentant significativement les risques de développement de cancers et de maladies neurodégénératives telles que la maladie d’Alzheimer et la maladie de Charcot.
Achats de produits de beauté
L’animal, qu’il soit vivant ou mort fait partie du règne « naturel ». Il n’est donc pas exclu, même s’il ne le précise pas, qu’un cosmétique estampillé « 100% d’origine naturelle » contiennent des ingrédients animaux.
Pour acheter des produits de beauté non testés sur les animaux, il faut choisir des cosmétiques avec les labels One Voice ou Human cosmetics standard ou Leaping Bunny.
Les cosmétiques peuvent remplacer la squalane par l’olive
La plupart des ingrédients provenant d’animaux ont leur substitut d’origine végétale ou synthétique. Pour le squalane, on peut le tirer de l’olive.
On peut donc « faire sans » extraits animaux. Mais comment faire cette différence sur les produits cosmétiques que nous achetons ? Impossible.
Qu’il soit issu de l’huile de foie de requin ou de l’olive, le squalane sera toujours du «Squalane ».
Toutefois, certaines étiquettes précisent que le produit est « sans extraits animaux » ou indiquent dans leur argumentaire de vente, l’origine végétale de ces ingrédients. Mais c’est loin d’être le cas pour toutes !
Et pourtant, c’est un argument marketing d’importance, auquel de plus en plus de consommateurs sont sensibles. Alors, lisez les étiquettes et renseignez-vous avant d’acheter votre cosmétique !